Vie du MEDEF

Revivez #LaREF23 - "#Watt'sTheFuture. Quelle lumière au bout du tunnel ?"

Avec Jean Jouzel, Agnès Pannier-Runacher, Dr Bertrand Piccard, Patrick Pouyanné, Luc Rémont et animé par Cécile Desjardins.

Verbatim

Jean Jouzel : "Le réchauffement climatique est clairement liée à l'activité humaine."

"Ce que nous observons aujourd'hui, notre communauté scientifique l'envisage depuis 40 ans... d'où l'importance d'accorder de la crédibilité à ce que nous envisageons aujourd'hui pour 2050."

"Il deviendra de plus en plus difficile de lutter contre le réchauffement, qui tient beaucoup à l'utilisation des énergies fossiles."

"On ne peut que partager l'appel d'Antonio Guteres, qui demandait d'arrêter tout investissement dans les combustibles fossiles, or ce n'est pas ce que nous faisons."

Agnès Pannier-Runacher : "La lutte contre le réchauffement est une priorité absolue du gouvernement. Il y a un combat climatique, mais aussi un combat de souveraineté et d'acceptabilité sociale."

"Il faut conjuguer la lutte contre le réchauffement, mais aussi pour la réindustrialisation."

Patrick Pouyanné : "Les fossiles, c'est toujours 81 % de l'énergie mondiale. J'entends l'urgence des scientifiques, mais en même temps il y a la vie réelle."

"Nous ne devons pas mettre des contraintes supplémentaires, la transition prendra du temps."

"Nous construisons un électricien bas carbone au sein de TotalEnergie, mais nous devons aussi assuré notre approvisionnement en pétrole."

"L'énergie augmente, mais il faut trouver des amortisseurs pour encaisser ces augmentations."

Luc Rémont : "Le renouvelable, c'est merveilleux, mais cela produit quand ça veut. Il faut donc mettre en face du renouvelable, du nucléaire et de l'hydraulique.

Dr Bertrand Piccard : "Le constat des scientifiques est correct, mais la conclusion qu'on en tire ne l'est pas."

"Notre monde est un monde du passé, un monde de gaspillage, qui coûte très cher."

"On ne doit pas dire il faut décarboner, mais il faut moderniser. Alors, on aura un consensus. La conséquence de la modernisation sera la décarbonation."

Agnès Pannier-Runacher : "L'impact du dérèglement climatique est majeur sur nos paysages et sur nos entreprises."

"Au niveau du gouvernement, nous avons pour objectif de sortir des énergies fossiles dans un calendrier rapide, vers 2040 ou 2045."

"Il faut utiliser juste ce dont on a besoin."

Jean Jouzel : "Réduire les fossiles est une nécessité."

"Pour atteindre la neutralité carbone, il faut faire vite et on ne va clairement pas assez vite."

Agnès Pannier-Runacher : "La France a massivement investi dans le renouvelable et nous sommes en ce domaine devant l'Allemagne."

"Il ne faut pas opposer renouvelable et nucléaire."

Luc Rémont : "Les consommateurs prennent de plus en plus le contrôle de leur énergie."

"Quand nous pensons au mix énergétique, il faut aussi prendre en compte ce que font les consommateurs."

Patrick Pouyanné : "On ne vendra pas la transition énergétique, si on ne parvient pas à s'engager dans une transition heureuse."

Dr Bertrand Piccard : "Les sources d'énergie vont de plus en plus être multiples, il faut savoir de quoi en parle."

"On sait très bien comment stocker les énergies intermittentes, mais il faut réfléchir à toutes les solutions et à toutes les mesures à mettre en place, ce qui implique de se remettre en question."

Luc Rémont : "Nous abordons l'hiver 2023 avec beaucoup plus de confiance que l'hiver précédent, mais cela ne veut pas dire qu'il faut arrêter la vigilance."

"Sur les prix, nous restons dans une économie de guerre et l'effet de cette économie ne va pas totalement disparaître en 2024."

Agnès Pannier-Runacher : "Le plan Sobriété a permis de faire baisser la consommation d'électricité et de gaz de 12 % en un an."

"Si on veut baisser les prix, il faut baisser la demande et augmenter la production."

"Le rôle des entreprises par rapport à cette production est fondamental."

"La réforme du marché de l'énergie européen a pour vocation de donner des visions à long terme. Si cela ne se fait pas au niveau de l'Europe, nous le ferons au niveau de notre pays."

Patrick Pouyanné : "Le marché du pétrole est un marché mondial, donc je ne vois pas les prix baisser rapidement."

"Sans la guerre russe, le marché énergétique européen ne fonctionnait pas si mal."

Agnès Pannier-Runacher : "Le marché de l'électricité a permis l'hiver dernier de fournir de l'énergie à tous les Européens."

Dr Bertrand Piccard : "Il faut aussi poser le sujet du cadre légal. Pour l'environnement et l'énergie, c'est un cadre archaïque. Il faut travailler beaucoup plus sur cet aspect là. Il faut uniformiser le changement législatif pour qu'il incite à devenir propre et efficient et à moderniser."

Patrick Pouyanné : "Le vrai sujet pour nous Européens, c'est le prix du carbone."

Pour aller plus loin

« En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des idées », tout le monde se souvient de ce slogan lancé en 1974 par l’Agence des économies d’énergie en plein choc pétrolier. Aujourd’hui, ce slogan reprend toute son acuité, à l’heure où la guerre en Ukraine et le renchérissement du prix du gaz et du pétrole placent la France et toute l’Europe face à l’inconfort de leur dépendance énergétique.

On n’a bientôt plus de pétrole, c’est un fait, mais a-t-on encore des idées ? « Nous devons prendre conscience que nous entrons dans un monde nouveau », déclarait en mars dernier Bruno Le Maire, en demandant aux Français de faire des efforts sur leur consommation d’énergie. L’Agence internationale de l’énergie (AIE) publiait dans la foulée un plan de dix mesures pouvant être mises en place immédiatement, afin de baisser nos consommations de pétrole et contribuer à faire retomber les prix. Bien sûr « chaque geste compte », mais si elle est nécessaire, cette chasse au gaspi ne résoudra en rien le problème sur le long terme. Les réserves de pétrole ne sont pas inépuisables et nous avons pour objectif d’atteindre d’ici 2050 la neutralité carbone. Ce constat implique de se creuser les méninges et d’être inventif pour accélérer la transition énergétique.

Faire face à la demande sans dégrader le climat ?

La consommation mondiale d’énergie ne cesse d’augmenter, et aujourd’hui encore pétrole, gaz et charbon dominent le mix énergétique. En 2020, les énergies fossiles représentaient en effet 84,3 % de l’énergie consommée selon une étude de BP. Si l’on en croit le cabinet The Shift Project, les seize pays pétroliers fournisseurs de l’UE vont connaître à partir de 2030 un déclin prononcé de leur production. La production mondiale de gaz naturel devrait également décroître entre 2023 et 2078, faute de réserves exploitables. Certes, les réserves de charbon sont beaucoup plus importantes, mais utiliser plus de charbon ne ferait qu’augmenter la pollution et aggraver le réchauffement climatique. C’est donc la quadrature du cercle.

Faire face à la croissance continue des besoins en énergie tout en préservant le climat est un défi majeur, qui nécessite une approche globale. Les solutions sont d’ailleurs loin d’être unanimes : énergies renouvelables, nucléaire, baisse drastique de la consommation… le problème est complexe.

Certains misent par exemple sur l’arrivée massive des véhicules électriques pour diminuer la consommation de pétrole. Mais le remplacement de l’ensemble du parc automobile n’est pas pour demain et la baisse de la consommation de carburant fossile liée à cet essor n’atteindra que 825 millions à 1,5 milliard de barils, ce qui ne représentera que 2,3 % à 4,2 % de la production mondiale.

On constate aussi un essor des énergies renouvelables, même si beaucoup déplorent des investissements très insuffisants en ce domaine. De plus, leur caractère intermittent et la multiplication des acteurs impliqués en rendent le pilotage complexe. Les énergies renouvelables, pour être réellement efficaces demandent qu’on puisse développer le stockage de leur production, ce qui aujourd’hui semble encore compliqué. La doxa écologiste misant sur un mix 100 % vert ne semble donc pas être pour tout de suite… même si les technologies ne cessent d’évoluer.

Quant au nucléaire, n’en déplaise à ses détracteurs, il représente selon l’AIE, la plus grande source d’électricité à faible émission de carbone en Europe. Mais les centrales du continent vieillissent et depuis Tchernobyl et Fukushima, le nucléaire fait peur et ce ne sont pas les menaces sur la centrale de Zaporijia qui vont arranger les choses. Mais là aussi les technologies évoluent et les réacteurs de demain, modulaires ou à fusion, pourraient jouer un rôle important pour la fourniture d’une énergie bas-carbone.

Quoi qu’il en soit, les énergies fossiles vont conserver une place prépondérante dans le mix des prochaines années. Il faut donc aussi chercher à limiter les émissions de CO2 qu’elles génèrent. Le captage et la réutilisation du CO2 pourraient être une piste. Véolia, par exemple, mène des expérimentations en ce sens.

L’efficacité énergétique de nos habitations, de nos bâtiments et de nos moyens de transports est une autre solution pour répondre à une partie de la demande croissante en énergie sans augmenter la consommation globale. « Il va falloir un véritable plan Marshall de l’efficacité énergétique, estime Nicolas Goldberg du cabinet Colombus Consulting, car les passoires thermiques, ce n’est plus possible ». Cela devra bien sûr s’accompagner de mesures incitatives de la part des pouvoirs publics.

L’affaire de tous

Résoudre la crise de l’énergie va donc nécessiter d’articuler sobriété énergétique, efficacité énergétique et développement d’énergies renouvelables. Cela implique une combinaison de politiques gouvernementales incitatives, d’innovations technologiques, de collaborations internationales et d’engagement de la part de la société tout entière : administrations, individus et entreprises.

Plutôt que de s’enferrer dans un débat binaire entre énergies fossiles et énergies renouvelables et de considérer ces deux options comme mutuellement exclusives, pourquoi ne pas adopter une approche plus nuancée et holistique, qui prenne en compte les avantages et les inconvénients de chaque type d’énergie et qui favorise une transition progressive vers un système plus diversifié et durable ?

Comme l’a récemment souligné Patrick Pouyanné, « la guerre qui est revenue frapper l’Europe montre à quel point l’énergie est une ressource essentielle pour tous (…) Plus largement, 2022 a démontré avec force que le monde d’aujourd’hui a encore besoin des énergies d’aujourd’hui, constituées à plus de 80 % d’énergies fossiles. Mais l’année 2022 est aussi venue nous rappeler l’urgence d’agir pour la décarbonation de nos économies. L’urgence consiste donc à construire le système énergétique de demain, tout en continuant à fournir l’énergie dont le monde a besoin aujourd’hui. »

Alors quelle sera l’énergie de demain et à quel prix ?